Nous
allons entendre successivement les textes du jour ; 4 textes très
différents dans le fonds et la forme.
Ils
ont tous un rapport avec la vie et la mort. Ils génèrent tous un dynamisme
créateur.
A
chaque texte j’apporterai un commentaire qui résume la réaction que me procure
personnellement leur lecture et espère que vous y trouverez matière à
réflexion.
Lecture
du psaume 5.
Prête
l’oreille à mes paroles, Seigneur, comprend mon murmure !
Sois
attentif à mes appels au secours, mon roi, mon Dieu !
C’est
à toi que j’adresse ma prière.
Seigneur
le matin tu m’entends ;
Le
matin je me présente à toi et je guette.
Car
tu n’es pas un Dieu qui prenne plaisir à la méchanceté ; le mal ne
séjourne pas auprès de toi.
Ceux
qui font les fiers ne tiennent pas devant tes yeux. Tu détestes tous les
malfaisants.
Tu
fais disparaître ceux qui profèrent le mensonge.
Le
seigneur a en abomination l’homme sanguinaire et trompeur.
Mais,
moi, par ta grande fidélité, je viens à ta maison ; dans la crainte qui
t’es due, je me prosterne devant ton temple sacré.
Seigneur,
conduis moi dans ta justice au nom de mes détracteurs ; aplanis la voie
devant moi.
Car,
il n’y a rien de sûr dans leur bouche.
Leur
sein n’est que ruine, leur gosier est une tombe ouverte, et leur langue se fait
glissante.
Demande
leur réparation ô Dieu !
Que
leur dessein amène leur chute !
Rejette-les
à cause de leurs transgressions sans nombre, car ils se rebellent contre
toi !
Alors
tous ceux qui trouvent en toi un abri se réjouiront ; leur vie sera
toujours un cri de joie.
Tu
les protégeras et ils exulteront en toi ceux qui aiment ton nom.
Car
toi Seigneur, tu bénis le juste ; comme un grand boulier tu l’entoures de
ta faveur.
Je
ne résiste pas au plaisir de relire ce
merveilleux verset qui résume si bien l’aspiration des croyants.
« Tous
ceux qui trouvent en toi un abri se réjouiront, leur vie sera toujours un cri
de joie. Tu les protégeras, et ils exulteront en toi ceux qui aiment ton nom ».
Vous
qui m’écoutez, vous qui confessez Jésus, votre vie, peut être un cri de joie
car Yahvé est un Dieu bon et agissant qui bénit le juste et l’entoure de sa
faveur, à la manière d’un grand bouclier.
Dans
la tradition Judaïque la survie après la mort n’est pas envisagée.
L’important
c’est la vie présente qu’il convient de mener au mieux et si possible longtemps.
Si
les héros de l’ancien testament que sont les patriarches ou Job par exemple,
vivent si longtemps c’est que Dieu les rassasie de jours à l’aune de leur
fidélité.
L’être,
survit par sa descendance. Dans ce contexte antique, le malheur absolu est le
manque d’enfants.
Les
épouses des patriarches, Sarah, Rebecca et Rachel, toutes stériles, voient la
malédiction pesant ainsi sur elles, levée par un Dieu agissant, signifiant
ainsi qu’il adopte Abraham, Esaïe et Jacob et par la même garantit l’avenir de
leur lignée.
Dans
une tout petite nation de l’Orient, ne
pas se poser le problème de l’après vie était très original, le pays voisin
dominant le monde, l’Egypte des pharaons, ne pensait qu’à cela, elle était
hantée par la mort.
Le
peuple d’Israël était quant à lui hanté par la vie.
Moïse
en menant les douze tribus des Hébreux hors des influences de l’Egypte libérait
son peuple d’une dépendance mortifère.
C’est
pourquoi ignorer le destin après la mort fut longtemps l’absolue croyance des
Juifs.
Il
y a là, pour moi, quelque chose de sain qui rejoins la tendance de beaucoup de
chrétiens à se préoccuper exclusivement de ce qui arrive maintenant dans notre
vie et à ne pas échafauder des théories sur ce que l’homme devient après la
mort. Laissez les morts enterrer les morts dis Jésus. Changez radicalement
maintenant..
Le
royaume est à construire ici-bas. Pour le reste Dieu y pourvoira, car son
amour, l’agape est sans bornes.
Actes
chapitre 5 versets 12 à 16.
Beaucoup
de signes et de prodiges se produisaient dans le peuple par les mains des
apôtres.
Ils
se tenaient tous, d’un commun accord au portique de Salomon.
Parmi
les autres, personne n’osait se joindre à eux ; mais le peuple les
magnifiait. De plus en plus de gens croyaient au Seigneur, une multitude
d’hommes et de femmes.
On
apportait les malades dans les grandes rues et on les plaçait sur des litières
et grabats, pour qu’à la vue de Pierre son ombre au moins puisse couvrir l’un
ou l’autre. La multitude accourait des villes voisines de Jérusalem, portant
les malades et les gens perturbés par des esprits impurs ; et tous étaient
guéris.
De
ce texte, sourd une véritable jubilation.
Le
peuple magnifiait les apôtres, une multitude
d’hommes et de femmes se mettait à croire.
Les
malades arrivaient de tous les horizons et étaient guéris du seul fait d’être
exposé à l’ombre de Pierre.
Vraiment,
nous sommes dans le mode de narration des contes de fées. Pourquoi ?
Très
probablement du fait qu’entre la date de
la mort de Jésus et l’écriture de ce texte vers 80, trois générations s’étaient
succédées.
La
parousie, c'est-à-dire le retour de Christ pour présider le jugement dernier, tant
espérée par une part des chrétiens, n’avait pas eu lieu et une certaine
désespérance s’était emparée de nombreux adeptes.
Les
calamités n’avaient pas manquées ; les exécutions de Pierre, Paul et de la
quasi-totalité des apôtres, la mise à
mort du frère de Jésus, Jacques chef de la communauté chrétienne de Jérusalem,
l’écrasement, par l’empire Romain de la résistance juive concrétisés par la
destruction du temple en 70.
Il
y a vraiment vers la fin du premier siècle de quoi perdre son enthousiasme de
nouveau converti.
Il
convenait donc, pour Luc, de survaloriser le comportement de la première génération
des adeptes entourant les apôtres encore vivants. Il fallait redonner la
vitalité nécessaire aux chrétiens chancelants pour servir et honorer le Christ.
Déjà
Paul avait écrit ses épitres, elles circulaient depuis une trentaine d’années et
faisaient état pour certaines (Galates, Corinthiens notamment) de fortes
rivalités entre annonciateurs de la bonne nouvelle. Enjoliver les souvenirs
heureux est alors compréhensible.
Ce
qui est étonnant en fait, c’est que la religion fondée par les apôtres, dont Paul,
se soit développée avec tant de dynamisme jusqu’à maintenant, en dépit des
luttes internes de pouvoir dans l’église, des idéologies totalitaires
véhiculées, de la confiscation par les clercs du message religieux aboutissant
à la mise en place de dogmes intangibles
travestissant le message de paix du christ et imposés par des pouvoirs ô
combien humains !.
Plus
le temps passe et plus le message de Jésus est reçu par les hommes de toutes
races.
Christ
se manifeste en permanence au cœur des hommes. Christ ressuscite partout autour
de nous, comme les fleurs jaillissent au Printemps dans une prairie desséchée
par l’Hiver.
Il
est vraiment ressuscité en nous.
Jean
chapitre 20 versets 19 à 23
Le
soir de ce jour là, qui était le premier de la semaine, alors que les portes de
l’endroit où se tenaient les disciples étaient fermées par crainte des juifs,
Jésus vint ; debout, debout au milieu d’eux, il leur dit : Que la
paix soit avec vous !
Quand
il eut dit cela, il leur montra ses mains et son côté.
Les
disciples se réjouirent de voir le Seigneur. Jésus leur dit à nouveau :
Que la paix soit avec vous !
Comme
le père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Après cela il souffla sur eux et
leur dit : recevez l’esprit saint. A qui vous pardonnerez les péchés,
ceux-ci seront pardonnés ; à qui vous les retiendrez, ils seront retenus.
Les
récits portant sur les apparitions de Jésus dans les 40 jours suivant sa mort
sont hétérogènes et ne concordent pas forcément. Par exemple Paul dans sa
première lettre aux Corinthiens (chapitre 5, verste 6) parle de 500 personnes
ayant vu ensemble le Christ or cet épisode impressionnant n’a laissé aucune trace
dans les évangiles, même pas dans les évangiles apocryphes !
Il
convient de noter que la forme des apparitions de Jésus durant une période
temporaire de 40 jours ne laisse en rien présumer de la forme que l’homme
serait susceptible de revêtir après sa mort.
C’est
à l’assomption que Jésus s’élève vers sa demeure finale dans une grande
lumière.
Tenons-nous
en donc aux paroles de Jésus fort peu disert sur le sujet qui lui semble
secondaire. Ce sont les vivants qui l’intéressent. Alors contentons nous de cette parole de Jésus répétée dans les 3
évangiles synoptiques « vous serez comme des anges de Dieu dans le
ciel. » !
Ayons
confiance, Dieu sait ce qu’il nous faut.
Le
texte que je viens de lire clôturait primitivement l’évangile de Jean.
Ultérieurement a été rajouté le chapitre 21 qui relate les apparitions de Jésus
en Galilée.
Des
autorités ont donc jugé bon de modifier l’épitre. D’ailleurs ce chapitre 21 est
admirable et renferme des richesses symboliques qui font penser à un texte
prégnostique.
De
même, le plus ancien évangile, celui de Marc se termine abruptement, après
qu’un ange ait indiqué aux femmes Marie Madeleine et Salomé que Jésus avait été
relevé et n’était pas ici.
Nul
récit de l’apparition dans la chambre haute. Le manque était tellement flagrant
qu’une conclusion longue fut ajoutée ultérieurement par l’église.
Ce
qui montre, avec bien d’autres exemples, que des ajouts et adaptations des
textes ont été conduits tant que le canon n’a pas été fixé à la fin du second
siècle.
Les
documents auxquels Matthieu et Luc ont eu accès pour composer leurs évangiles
sont ; la source Quelle, l’évangile de Marc, les lettres de Paul et peut
être d’autres documents non parvenus à notre connaissance.
Les
études peuvent déterminer approximativement le contenu de la source Quelle.
Cette source ne mentionne ni la résurrection de Jésus, ni toute l’histoire de
la passion, ni la résurrection des morts.
La
découverte en haute Egypte de l’évangile de Thomas, aussi ancien pour certaines
parties que ceux de Luc et Mathieu, a
permis de constater que lui non plus ne parlait ni de la résurrection de Jésus
ni de sa passion.
Le
pasteur Henri Persoz dans son livre récent « impensable
résurrection » écrit
« Dans deux textes, évangile de Thomas et Didaché,
Jésus apparaît comme un sage qui proclame la nécessité d’une révolution
conduisant à un monde nouveau, le fameux royaume de Dieu fondé sur l’amour du prochain.
Jésus
n’est pas présenté comme le messie devant souffrir sur la croix pour sauver
l’humanité.
Ces
textes n’invitent pas à une croyance nouvelle mais à un comportement nouveau.
Nous
sommes ici à l’opposé de la pensée Paulinienne, puisque l’apôtre ne parle
pratiquement pas de l’enseignement de Jésus et écrit dans sa première lettre
aux Corinthiens (2,2)
« J’ai
jugé bon parmi vous de ne rien savoir d’autre que Jésus Christ et Jésus Christ
crucifié »
Tout
ceci nous montre qu’au début de la formation du christianisme et pour certains
milieux, le souvenir de Jésus, qu’il était important de conserver, était son
message de sagesse et non le message de sa mort dramatique et de sa
résurrection ».
Ces
dernières considérations ne sont pas partisanes, mais visent à aborder avec
objectivité les thèmes aussi fondamentaux que la résurrection du Christ et
celle des croyants.
Notre
liberté est de construire pour nous même notre propre corpus de croyant, il
n’est pas de tradition qui prévalent.
Je
trouve pour ma part peu vraisemblable que Jésus ressuscité traverse les murs et
qu’il porte encore les stigmates de son supplice.
Par
contre que l’auteur Jean cherche par ce récit à me rappeler que Dieu n’est pas
le Dieu des morts mais des vivants, cela j’y crois.
Quand
Jésus se présente en disant, la paix soit avec vous » et poursuit en
disant « comme le père m’a envoyé moi aussi je vous envoie », cela
résonne en moi, cela a du sens.
Comme
le grand théologien Bultmann l’écrit dans la première moitié du 20 me siècle
« La
vision biblique du monde est mythologique ; elle est de ce fait inacceptable pour l’homme
moderne dont la pensée n’est plus mythologique car modelée par la science. Bien
sûr il existe encore aujourd’hui des séquelles de la pensée primitive et de la
superstition auxquelles on s’efforce de redonner vie. La prédication de
l’église, néanmoins, commettrait une erreur désastreuse si elle venait à prendre en considération ces
survivances et s’y conformait »
On
ne peut être plus explicite !
Apocalypse
chapitre 1 versets 9 à 19
Moi
Jean, votre frère, et qui ai part avec vous à la tribulation et au royaume et à
la persévérance en Jésus, j'étais dans l'île appelée Patmos, à cause de la
parole de Dieu et du témoignage de Jésus.
Je
fus ravi en esprit au jour du Seigneur, et j'entendis derrière moi une voix
forte, comme le son d'une trompette,
qui
disait: Ce que tu vois, écris-le dans un livre, et envoie-le aux sept Églises,
à Éphèse, à Smyrne, à Pergame, à Thyatire, à Sardes, à Philadelphie, et à
Laodicée.
Je
me retournai pour connaître quelle était la voix qui me parlait. Et, après
m'être retourné, je vis sept chandeliers d'or,
et,
au milieu des sept chandeliers, quelqu'un qui ressemblait à un fils d'homme,
vêtu d'une longue robe, et ayant une ceinture d'or sur la poitrine.
Sa
tête et ses cheveux étaient blancs comme de la laine blanche, comme de la
neige; ses yeux étaient comme une flamme de feu;
ses
pieds étaient semblables à de l'airain ardent, comme s'il eût été embrasé dans
une fournaise; et sa voix était comme le bruit de grandes eaux.
Il
avait dans sa main droite sept étoiles. De sa bouche sortait une épée aiguë, à
deux tranchants; et son visage était comme le soleil lorsqu'il brille dans sa
force.
Quand
je le vis, je tombai à ses pieds comme mort. Il posa sur moi sa main droite en
disant: Ne crains point!
Je
suis le premier et le dernier, et le vivant. J'étais mort; et voici, je suis
vivant aux siècles des siècles. Je tiens les clefs de la mort et du séjour des
morts.
Écris
donc les choses que tu as vues, et celles qui sont, et celles qui doivent
arriver après elles.
Ce
texte, emprunte, bien-entendu, la forme apocalyptique traditionnelle.
N’aurait-il
plus rien à nous dire de ce fait ? Pour ma part je dis non, car il renferme
des passages éblouissants dont nous
pouvons tirer enseignement.
Je
retiens tout particulièrement la phrase suivante.
« Quand
je le vis, je tombais à ses pieds comme mort. Alors il posa sa main droite sur
moi en disant ; n’ai pas peur ! C’est moi qui suis le premier et le
dernier, le vivant.
Je
suis mort, mais je suis vivant à tout jamais, et j’ai les clefs de la mort et
du séjour des morts. Ecris donc ce que tu as vu »
L’utilisation
du terme vivant pour qualifier Jésus n’est pas originale, d’autant que comme je
vous l’ai indiqué, les Sadducéens ne
s’intéressaient qu’à l’être vivant.
Mon
attention a été attirée par le fait que Jean tombe aux pieds de Jésus, comme
mort.
L’homme
de lumière dit-alors « n’aie pas peur », de même dans la chambre
haute Jésus rencontrant les disciples leur dit
deux fois « la paix soit avec vous », avec la même
préoccupation d’apaiser les angoisses humaines. Pour ce faire il pose la main
droite sur Jean. Le récit d’héroïque devient intime.
L’être
effrayant dévoile son caractère humain et aimant.
Et
pour faire sortir ses interlocuteurs de leurs peurs instinctives et stérilisantes,
il leur confie des missions. Pour les disciples c’est « je vous
envoie », pour Jean c’est « écris donc ce que tu as vu ».
Jésus
nous re suscite ou nous relève, si vous préférez ce terme, par l’action. Notez
d’ailleurs que Jésus apparaît debout aux disciples pour les inciter à quitter
leurs attitudes abattues, à se lever et se ressaisir, à son exemple.
Ainsi
nous sommes vivants lorsque nous accomplissons une mission pour Dieu.
Jésus
est dans l’agir, il n’est pas dans les macérations, les épreuves, il veut que
debouts nous participions ici et maintenant à la construction du projet de
Dieu.
C’est
pourquoi le baptême de l’esprit est d’abord une mort, mort à nos attachements
stériles, mort aux rigidités des dogmes et lois, mort aux rapports liberticides
qu’imposent les familles, les pouvoirs religieux et politiques. Pour changer
radicalement, comme le demande avec obstination Jésus, il faut d’abord renoncer
à nos sécurités factices ou illusoires.
C’est
pour cela que le baptême, auquel Jésus procède sur ses disciples harassés et
humiliés par leurs manquements, est accompagné d’une incitation à agir.
Concentrez
vous sur l’avenir, sur ce qu’il faut construire, réformer en mon nom, renoncez
à vous plaindre, vous mésestimer, ouvriers de la première et dernière heure,
réveillez- vous.
Jésus
est éternel, « je suis le premier et le dernier, le vivant » car il
une mission sans début et sans fin, celle de faire connaître Dieu aux hommes.
Pour
conclure, je cite à nouveau le pasteur Persoz ;
« Le
génie des tous premiers chrétiens, transformé en une foi profonde a été de
comprendre que cet homme Jésus marquerait toutes les générations à venir
de ses engagements avec les hommes ses frères et de son dépouillement face à la
mort. Ils l’ont exprimé avec le langage du temps. Peut être que la puissance du
personnage, sa personnalité hors du commun était encore plus forte que ce que
nous en fait connaître les évangiles ».
Christ
est jadis ressuscité, il ressuscite là dans nos cœurs car il nous confie une
mission et suscitera encore et toujours des ouvriers pour s’associer au projet
de Dieu.
Amen