Marc 7 versets 1 à 10, Marc 11
versets 27 à 33
En ce temps nous évoquons la poursuite d’une
étoile par des maîtres de l’orient.
Ces mages, le regard vissé
vers le ciel, sont subitement conduit à abaisser les yeux vers un petit être
pauvrissime au ras du sol.
Ce moins que rien couché sur
la terre froide dans la paille d’une litière, c’est l’homme, tiré de la glèbe,
modelé par la main de Dieu dans une poignée d’argile.
Comment ce petit être miséreux
trouvera t’il une
autorité suffisante pour bouleverser l’ordre du monde ?
C’est ce que je vous propose
de considérer.
Nous vivons dans une société
d’une très grande fragilité, dont les mécanismes complexes, visant à assurer le
bien être des populations, sont de plus en plus délicats à ajuster.
Jamais les hommes n’ont été
aussi dépendants les uns des autres.
Pensez, par exemple, à notre
approvisionnement en énergie majoritairement assuré par des centrales atomiques
dont les rejets, s’ils sont accidentellement dispersés dans l’environnement, peuvent empoisonner les êtres vivants durant
des milliers d’années et ceci bien au-delà des frontières de notre pays !
Juguler les maladies
épidémiques intéresse l’humanité entière et nécessite les efforts conjugués de
toutes les nations.
Réguler les grands équilibres
de notre biosphère suppose des décisions simultanées de tous les humains.
Nourrir des milliards
d’individus et réguler la croissance démographique, supposent des décisions
rapides au niveau de la terre entière.
Une guerre mondiale est
inconcevable pour les pays développés, imaginez en effet ce qu’entraînerait,
notamment, la destruction de nos centrales. Sans énergie électrique que
deviendraient tous ceux qui habitent les mégalopoles ?
Apaiser les conflits naissant
immanquablement dans des espaces chichement comptés, entre des populations
souvent déracinées, suppose un maintien de l’ordre efficient.
Sans aucun doute les hommes
sont condamnés à la solidarité à tous les niveaux d’organisation de leurs
sociétés.
Partout, comme jamais dans le
passé, l’humanité a besoin d’autorités qualifiées et légitimes, dont les
décisions ne visent pas, avant tout, à assurer leur réélection, la prééminence
de leur tribu et leurs intérêts propres.
Les autorités, si nécessaires
dans cette phase de mutation que nous vivons, sont paradoxalement contestées, comme jamais, par les populations
inquiètes.
Celles- ci, pour se protéger, se
replient sur les religions traditionnelles, la famille, la nation.
Les autres, les gens
d’ailleurs, deviennent les responsables faciles des désillusions et
souffrances. Alors les haines s’installent.
Jamais le monde n’a eu autant besoin d’élites d’une haute
spiritualité, se dévouant au bien commun et dont l’autorité est acceptée et
reconnue par la majorité des citoyens.
Cet état de fait, nous impose
de rechercher ce que la bible a à nous
indiquer en ce domaine.
N’ayez crainte je n’ai pas
l’ambition d’épuiser le sujet.
Je cherche plutôt à fournir
quelques points de repère pour nous inciter à réfléchir sur ces problèmes
délicats.
Le texte que je vous ai lu en
Marc 7, figure aussi, presque à l’identique, dans les évangiles de Matthieu et
Luc. Cela est un signe de son importance.
Le problème de l’autorité est
souvent abordé tout au long du nouveau testament.
La mort ignominieuse de Jésus
est d’ailleurs la conséquence directe du refus du Sanhédrin et des scribes de reconnaître
l’autorité de ce Galiléin .
Selon Jean (18, 37 et 38) la dernière phrase de Jésus
devant Pilate fut :
« Moi,
si je suis né et si je suis venu dans le
monde, c’est pour rendre témoignage de la vérité »
Ce à quoi Pilate répond par
« Qu’est ce que la vérité ? »
Cette vérité selon le pasteur
Marc Pernod c’est « une façon
d’être, pas un ensemble de dogmes figés comme le présentent les extrémismes »
Le monde spirituel Juif, à
l’aube de ce premier siècle, est figé, enfermé par des lois révélées et de ce fait sacrées.
Les juifs sont arc bouté
autour des prêtres du temple de Jérusalem seuls garants d’une certaine
autonomie face à l’envahisseur Romain.
Ces juifs attendent un sauveur
miraculeux, car seul un miracle peut éviter un désastre programmé par les
Romains.
L’image que se font les juifs
d’un sauveur est celle de David ou peut être Moïse, un être mu par l’esprit de
Dieu, libérant d’une main puissante le peuple élu.
Jésus n’a pas le profil requis et en outre il ose, dans le
temple même, venir pourfendre les prêtres, les scribes et les Pharisiens, les
traitant de sépulcres blanchis.
Saper les colonnes
que sont ces serviteurs sacrés de Dieu conduit, sans aucune sorte de doute, à l’écroulement
du temple.
Or le temple est le lieu où Dieu rencontre son peuple. (1Samuel
2,8)
« car à
l’éternel sont les colonnes de la terre. Et c’est sur elles qu’il a posé le
monde »
Sans temple il n’est plus de Dieu pour les juifs
traditionnels !
Jésus est un nouveau Samson, comme lui il focalise toutes
ses forces sur l’écroulement de colonnes !
Dans les actes, les apôtres Pierre, Jean et Jacques sont
curieusement nommés les colonnes, c’est une allusion directe aux colonnes du
temple.
Le nouveau temple de la chrétienté est un édifice
constitué par des hommes en chair et en os!
Paul s’exprime en Romain 2 versets 17 à 24 de la même manière
que Jésus vis-à-vis des gardiens du sanctuaire, je cite
“Toi qui te donnes le nom de Juif, qui te
reposes sur la loi, qui te glorifies de Dieu, qui connais sa volonté, qui
apprécies la différence des choses, étant instruit par la loi; toi qui te
flattes d’être le conducteur des aveugles, la lumière de ceux qui sont dans les
ténèbres, le docteur des insensés, le maître des ignorants, parce que tu as
dans la loi la règle de la science et de la vérité; toi donc, qui enseignes les
autres, tu ne t’enseignes pas toi-même! Toi qui prêches de ne pas dérober, tu
dérobes! Toi qui dis de ne pas commettre d’adultère, tu commets l’adultère! Toi
qui as en abomination les idoles, tu commets des sacrilèges! Toi qui te fais
une gloire de la loi, tu déshonores Dieu par la transgression de la loi! Car le
nom de Dieu est à cause de vous blasphémé parmi les païens, comme cela est
écrit. »
Pour comprendre la virulence de ces attaques, il faut bien
assimiler ce sur quoi se fonde l’autorité des élites religieuses juives.
Cette autorité trouve son fondement dans la Torah, or il y
a deux Torah, la Torah écrite et la Torah orale.
La Torah orale désigne
une doctrine oralement transmise, concomitante à la Torah écrite, inséparable
d’elle et existant depuis la révélation de celle-ci sur l’Horeb.
Le pharisianisme,
auquel succède, après la seconde destruction du temple en 70, le judaïsme
rabbinique, se distinguait par son insistance à proclamer sa mission : transmettre
la tradition orale.
La tradition orale se
veut fidèle à la révélation faites à Moïse au Sinaï, au point d’exiger du
répétiteur qu’il transmette l’enseignement suivant les termes mêmes qui lui ont
été transmis, chaque génération ajoute des éléments à ce message oral.
Ces éléments sont les
interprétations de la loi et ses modalités d’application exprimées par les docteurs
de la loi.
Dans cette optique, la Torah est infinie de sens. Tous
ces sens ont été transmis par Dieu à Moïse, seuls certains ont été transcrits
par écrit, les autres ont été confiés à Moïse durant les 40 jours passés au
sommet de l’Horeb, ils ont été transmis
à Josué puis de génération en génération aux hakhamim (les sages) qui énoncent la signification et l’étendue des
principes et lois contenues dans la Torah.
Ainsi la Torah est
comprise et appliquée différemment au fil du temps en fonction des
modifications sociétales et des interprétations des docteurs.
Les sages lorsqu’ils
transmettent la Torah orale, pour ne pas rompre l’enchaînement sacré des
transmissions, se réfèrent aux maîtres précédents dont ils adaptent les
enseignements au temps présent.
L’autorité des docteurs
est ainsi liée à la révélation faite à Moïse.
Il est en conséquence
tout à fait légitime que les scribes et les prêtres demandent à Jésus d’une
part de qui il détient l’autorité et d’autre part à quels maîtres il se réfère
pour parler comme un docteur de la loi.
Jésus rassemble les
foules de par son autorité naturelle et son savoir.
Toutefois quand il
parle il ne se réfère jamais à la tradition et aux maîtres, il ne se situe pas
dans la lignée des sages dont l’autorité résulte directement de la révélation
faite à Moïse au Sinaï.
Alors de qui tire t’il
son autorité ?
S’il répond qu’il la
tire directement de Dieu, il commet un blasphème aux yeux du Sanhédrin, car pour les docteurs, la loi a été dans sa
totalité et une fois pour toutes transmise à Moïse.
S’il ne veut pas citer les
maîtres rabbiniques dont il s’inspire,
il ne peut être qualifié de docteur.
Jésus se tire de ce
péril par la ruse, mais il est piégé car il défie frontalement les pouvoirs sacrés des prêtres, scribes,
sages et anciens.
L’autorité de Jésus
comme le dit Tillich « n’est pas l’image consacrée d’un homme qui
gouvernerait en dictateur : il a l’autorité de l’homme mort sur la croix »
Autrement dit, il a l’autorité
dont chaque homme dispose, qu’il soit pendu au bois ou roi.
Chaque homme est un être
unique aux yeux d’un Dieu qui le nomme et par là même lui donne sa dignité, mais
aussi une part de son énergie vitale en tant que créateur.
Jésus vient pour nous
persuader de poursuivre dans sa voie, la recherche acharnée de la vérité hors des
doctrines éculées et ce dans la liberté
des enfants de Dieu.
Comme Paul nous pouvons
dire, tout m’est permis mais tout ne me convient pas.
Ce qui fait l’autorité,
Jésus le dévoile aux envoyés de St Jean Baptiste
(Luc 7 versets 18 à
30) “ Jean Baptiste nous a envoyés vers toi, pour dire: Es-tu celui qui doit
venir, ou devons-nous en attendre un autre? A l’heure même, Jésus guérit
plusieurs personnes de maladies, d’infirmités, et d’esprits malins, et il
rendit la vue à plusieurs aveugles. Et il leur répondit: Allez rapporter à Jean ce que vous avez vu et
entendu: les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés,
les sourds entendent, les morts ressuscitent, la bonne nouvelle est annoncée
aux pauvres »
Voilà la clef, Jésus met au dessus de tout, l’individu qu’il veut rendre
capable de collaborer aux projets de
Dieu. Peu lui importent les démonstrations de puissance des prêtres et des
scribes. Ils se sont assis dans la chaire de Moïse (Matthieu 23 :1 à
15), autrement dit- ils régissent la Thora sans respecte ce qu’ils
prescrivent.
C’est ce que Jésus relève quand il prévient les disciples : « N’agissez
pas selon leurs œuvres car ils disent et ne font pas. Toutes les œuvres ils les
font pour être vus des gens ! Et Jésus poursuit en se dévoilant Ne
vous faites pas appeler Docteur car un seul est votre docteur, le Christ. Le
plus grand parmi vous sera votre serviteur ».
Ainsi Moïse n’est-il plus la référence unique, Jésus dans sa faiblesse de
serviteur est dorénavant le seul docteur.
Ce qui importe ce sont les efforts que nous déployons pour accompagner
les autres dans leur cheminement avec Christ. L’homme se révèle à soi même en
recherchant à rencontrer et secourir ceux qui peinent.
Le commandement le plus grand énoncé par Jésus est « tu aimeras
le seigneur ton Dieu…tu aimeras ton prochain comme toi-même »
Nous avons ainsi les clefs et les raisons du choc entre les autorités
religieuses juives et Jésus.
La qualité du cheminement de Jésus, sa capacité relationnelle justifient son
autorité. Jésus est capable de compassion, il relève les êtres résignés à
n’être plus rien, sans avenir, sans projet tout comme aussi les puissants, ceux
là même qui l’ont pendu au bois. A tous il fournit l’étincelle d’énergie qui
ressuscite et fait d’eux des born again
pour peu qu’ils l’acceptent.
C’est ce qu’exprime Paul en Romain 10 verset 4
« Le Christ est la
fin de la loi, pour que la justice soit à quiconque croit. »
Ne croyez pas que j’ai oublié la première partie de l’exposé.
Oui notre monde est en péril, oui les problèmes doivent être résolus dans
la plus grande unanimité, oui notre vieille bible a quelque chose à dire, elle
nous mobilise afin que nous portions le message évangélique aux hommes
déboussolés.
Ceux-ci fédérés avec les adeptes des autres religions de paix seront
alors en mesure de relever les défis du 21 me siècle.
Un homme est venu, il a mis à mal des dogmes et des lois interprétés par
des docteurs issus de castes dominantes,
de telle sorte que leur prééminence soit assurée.
Jésus nous rappelle que l’homme a été créé libre. Cette liberté conduit
parfois à des erreurs. Ces erreurs sont regrettable mais peuvent toujours être
surpassées.
Car, ainsi que le dit Paul en Rom 5-20
« là où le péché a abondé,
la grâce a surabondé »
Avec les chrétiens du passé et d’aujourd’hui et tous les hommes qui
espèrent et qui cherchent, nous clamons : courage car il ressuscite sans
cesse en nous.
Tous unis dans la fraternité des enfants de Dieu nous sommes rendus capables
par Christ de renverser les esclavages de toutes sortes, les comportements
racistes , les inégalités aliénantes et les coupures sociales qui gangrènent
nos rapports inter humains et retardent
les nécessaires décisions engageant l’avenir.
Sans relâche menons le beau combat, la plus belle aventure qui soit,
celle de la foi.